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Voies d'Assise : vers l'Unité
Voies d'Assise : vers l'Unité
  • Blog dédié à Jacques Breton (prêtre, habilité à transmettre le zen, assistant de K.G. Dürckheim, instructeur de kinomichi) et au Centre Assise qu'il a créé en le reliant à l'abbaye de St-Benoît-sur-Loire (France) et au monastère zen du Ryutakuji (Japon).
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20 avril 2021

L'ange se tient derrière nous - Conscience sensitive dans la nuque - selon Graf Dürckheim

Voici 3 textes. Les deux premiers sont de K-G Dürckheim : "L'ange se tient derrière nous" et "Sentir vers l'intérieur", publiés dans Sagesse et amour[1], le 3e texte est de Jean Marchal, extrait de "De l'assise profane à l'assise sacrée : l'assise comme symbole" un article publié dans Revue Française de Yoga.

Le premier texte de Dürckheim s'intitule "L'ange se tient derrière nous", et Jean Marchal (qui est, entre autres, un disciple de Dürckheim) évoque une icône de saint Jean l'évangéliste dans laquelle un ange se tient derrière saint Jean ! Et le 2e texte, "sentir vers l'intérieur" suggère de placer la conscience dans la nuque.

 

 

I – Deux textes de Sagesse et amour

K-G Dürckheim

 

Dürckheim, Sagesse et amour

1. L'ange se tient derrière nous

 

Une crispation de la musculature ne signifie pas seulement une tension sur le plan corporel, mais aussi une tension de l'homme tout entier, en tant qu'être de chair.

Cette tension devient plus sensible dans les zones des épaules et de la nuque, car on se laisse facilement aller à adopter une position légèrement penchée en avant. Là s'exprime une attitude de méfiance envers la vie, une aspiration à vouloir se protéger contre ce qui vient.

En revanche, dans l'attitude de la confiance envers la vie et envers soi-même, on adopte plutôt une position légèrement inclinée vers l'arrière. Au repos, par exemple, on s'adosse confortablement vers l'arrière, en une position détendue, sereine.

C'est la raison pour laquelle la façon dont nous nous tenons, dans notre colonne vertébrale et dans la nuque, a une telle importance dans notre attitude envers nous-même et envers la vie.

  • Celui qui se fixe vers l'avant demeure dans son moi, qui est plus orienté vers l'avant.
  • Celui qui prête l'oreille à l'arrière, qui est capable de s'ouvrir dans le dos en se distanciant de son moi, celui-là laisse à son essence l'espace dont elle a besoin pour devenir perceptible en nous. L'ange se tient derrière nous.

C'est pourquoi, lorsque nous lâchons prise, nous faisons, pour ainsi dire spirituellement, une courbe vers l'arrière, en direction de la colonne vertébrale, et nous prenons garde que la zone entre les omoplates demeure ouverte et détendue. C'est ainsi que nous intégrons l'homme tout entier à l'exercice.

 

2. Sentir vers l'intérieur

 

Dans l'exercice, nous recherchons la perméabilité vers notre essence. Car, quelle que soit la modalité selon laquelle le supramondain en tant qu'essence est présent en nous, elle est toujours vie, Grande VIE : ce qui veut dire mouvement ininterrompu, mouvement métamorphosant.

Entrave la Vie tout ce qui est statique. Ce caractère statique est la marque de notre moi mondain, pour lequel il importe avant tout de se maintenir dans le monde, de ne pas être renversé, aussi bien au sens spirituel que corporel.

La source de cet effort est la conscience fixée sur les objets, à laquelle il faut opposer une conscience sensitive, ainsi que nous allons l'apprendre dans l'exercice.

Cette conscience sensitive n'est pas localisée dans le front, mais dans la nuque. C'est de là que nous devons sentir l'intérieur, et de là que nous devons sentir le mouvement de la métamorphose – Lâcher prise, se laisser choir, devenir un dans l'expiration ; sentir jusque dans cette profondeur où nous sommes assagis et détendus dans le ventre et le bassin, et où nous observons le flux entrant de l'inspiration.

Nous ne faisons pas l'inspiration, elle vient. Nous accueillons quelque chose, tout comme nous donnons quelque chose dans l'expiration. Ainsi tourne la roue de la métamorphose : donner – donner – donner – recevoir. Donner – donner – donner – recevoir.

L'inspiration est un don de la grande expiration, car nous recevons un cadeau dans l'inspiration : le don dedans.

Chercher à ressentir cela.

 

 

II – Extrait de "De l'assise profane à l'assise sacrée : l'assise comme symbole"[2]

Jean Marchal

 

 

saint Jean en silence, icôneIl est une icône de saint Jean l'évangéliste, dite « Saint Jean assis en silence » dont le type est apparu en Russie autour du XIVe siècle qui symbolise bien ce que doit être une assise, l'écoute du "Royaume des cieux" au-dedans de nous. Jean très âgé y est représenté assis, un doigt sur la bouche (chut !) indiquant la nécessité du silence absolu des pensées et des émotions pour entendre la voix de l'ange qui se trouve derrière son dos et lui parle à l'oreille gauche, celle qui capte l'au-delà de son ordinaire. De cette inspiration par l'ange (qui est certainement un "trône") naît le livre qu'il tient ouvert sur ses genoux, Évangile ou Apocalypse.

Ceci nous renvoie à ce conseil que donnait souvent Karlfried Dürckheim à ses élèves : essayez de déplacer votre conscience du front, où elle siège habituellement, vers la coupe constituée par l'arrière du crâne. "Situé" dans cette coupe, vous vous donnez la chance de faire l'expérience d'une conscience du Tout Autre qui est votre être essentiel[3].

En effet, tout se passe comme si cette conscience ultime, qui est notre vrai Soi, siégeait derrière le cerveau qui joue le rôle de barrage filtrant pour la vision unifiante et totalisante qu'elle nous envoie du monde et de nous-même, en ne laissant passer à notre conscience ordinaire que des influx déformés et fragmentés qui nous envoient un monde fait d'objets et d'êtres séparés et seulement sous leur aspect matériel[4].

Le Verbe divin (le Logos) est cette conscience du Soi dont le message filtré et dévié par le cerveau emplit notre conscience "ego" de mots (logoï) au sens appauvri, limité, et assemblés en pensée par le mécanisme du langage.

Il s'agit dans l'assise, comme le disait sans cesse Ramana Maharshi, de remonter à la source de nos pensées, en deçà du filtre cérébral, là où siège l'ange sur l'icône de saint Jean. Il importe de demeurer là en silence pour y intégrer l'influence angélique qui nous ouvre à la conscience ultime de notre être essentiel : tel est le message initiatique que nous délivre cette



[1] Éd. Alphée 2005. Les deux textes sont p. 23-26.

[2] L'article est dans Revue Française de Yoga, n° 22, « Postures de l’assise », l'article est pp. 69-94

[3] Ce qui nous renvoie au sens de la "Quête du Graal", ce grand mythe médiéval.

[4] Cf. à ce sujet le remarquable ouvrage du physicien français Régis Dutheil : L'homme super lumineux (éditions Sand, 1998). Il écrit : « La conscience totale possède donc deux propriétés essentielles : elle est information pure et instantanéité. Le problème qui en découle est alors le suivant : pourquoi la totalité des informations contenues dans la conscience superlumineuse n'est-elle pas détectée par le cortex cérébral ? S'il en était ainsi l'univers sous lumineux tel que nous le vivons n'existerait pas. Une condition nécessaire à cette existence est la présence de filtres qui ne laissent passer qu'une toute petite partie de cette information suivant des séquences causales, de manière à entraîner la sensation d'écoulement du temps. L'importance de ce problème des filtres avait déjà été soulevée par Bergson. […] Dans l'univers super lumineux, le temps est spatial et la durée et l'écoulement du temps sont remplacés par une instantanéité permanente… » Livre sur http://ekladata.com/mWSYWmYvMi9xe5CA5LkktZlkrwg/Dutheil-L-homme-superlumineux.pdf

 

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