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Voies d'Assise : vers l'Unité
Voies d'Assise : vers l'Unité
  • Blog dédié à Jacques Breton (prêtre, habilité à transmettre le zen, assistant de K.G. Dürckheim, instructeur de kinomichi) et au Centre Assise qu'il a créé en le reliant à l'abbaye de St-Benoît-sur-Loire (France) et au monastère zen du Ryutakuji (Japon).
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18 juin 2025

Sandôkaï, poème zen. Vers l'unité

Ce poème parle des contradictions et de la dualité du monde et indique que tout cela peut aller vers une unité à portée de main, d'œil et d'oreille !

Le Sandôkaï date du VIIIe siècle, il est attribué à Sekitô Kisen, le 8e patriarche chinois du bouddhisme chan dont on peut voir le corps momifié en posture au temple de Soji-ji au Japon. Le Sandôkaï est chanté tous les matins dans tous les temples zen Sôtô. Le dernier vers est éventuellement mis sur le bois qu’on frappe au zazen : « Vous qui cherchez la voie, je vous en prie, ne laissez pas passer les jours et les nuits en vain. »

 

Le titre Sandôkaï est traduit de différentes façons car il est composé de trois caractères chinois (参同契) dont la signification est sujette à interprétation. Il est par exemple traduit par “l'Harmonie entre la différence et l'identité” ; “La Concordance entre différence et identité” ; “La Coïncidence de l'égal et de l'inégal” (Philippe Cornu), “l'Interpénétration de l'Essence et des phénomènes” (Jacques Brosse) ; “Identité du multiple et du un” ; “Rencontre entre l’identité et la différence” ; “Unicité de la réalité et de la vacuité”, etc.

 

Voici maintenant une traduction sans prétention d'exactitude ! Elle s'appuie sur le texte de l'article de wikipédia et tient compte de l'étude de Shunryu Suzuki, La source brille dans la lumière, Ed. Sully, 2001 (et réédité depuis). Le texte japonais vient de https://sacred-texts.com/bud/zen/sandokai.htm où la traduction est en anglais. Il y a 44 versets de 5 caractères, donc 220 en tout.

Le grand sage de l'Inde dont il est question est Bouddha Shakyamuni. Les versets de 5 kanji vont par deux.

 

 

Sandôkaï

參同契

 

竺土大仙心    L'esprit du grand sage de l'Inde

東西密相付    s'est fidèlement transmis d'ouest en est.

人根有利鈍    Tandis que les facultés humaines sont aiguisées ou émoussées,

道無南北祖    n'a pas de patriarche du nord ou du sud..

靈源明皎潔    La vraie source brille clairement dans la lumière;

枝派暗流注    les effluents coulent dans l'obscurité.

執事元是迷    S’attacher aux phénomènes est cause d’illusion;

契理亦非悟    s'accorder avec l'identité n'est pas encore illumination.

門門一切境    Tous les objets des sens

迴互不迴互    sont en interaction et ne le sont pas.

迴而更相    L'interaction entraîne la relation.

不爾依位住    sinon chacun reste à sa place.

色本殊質像    Les visions varient en qualité comme en forme,

聲元異樂苦    les sons sont tantôt agréables, tantôt désagréables.

闇合上中言    Les discours raffinés et vulgaires se confondent dans l'obscurité,

明明清濁句    les phrases claires et troubles se distinguent dans la lumière.

四大性自復    Les quatre éléments retournent à leur nature

如子得其母    comme un enfant retourne à sa mère;

火熱風動搖    Le feu chauffe, le vent bouge,

水濕地堅固    l’eau mouille, la terre est solide.

眼色耳音聲    Pour l'œil il y a la vision, pour l'oreille les sons,

鼻香舌鹹醋    pour le nez les odeurs, pour la langue la saveur;

然於一一法    Ainsi pour toutes les choses qui existent

依根葉分布    en dépendant de leur racine, les feuilles se développent.

本未須歸宗    Le tronc et les branches partagent l'essence;

尊卑用其語    noble ou vulgaire, chacun a son discours.

當明中有暗    Dans la lumière il y a l’obscurité,

勿以暗相遇    mais ne la voyez pas comme obscurité;

當暗中有明    Dans l’obscurité il y a la lumière, ,

勿以明相睹    mais ne la voyez pas comme lumière.

明暗各相對    La lumière et l’obscurité s'opposent l'une à l'autre

比如前後歩    comme le pied avant et le pied arrière dans la marche.

萬物自有功    Les innombrables choses ont leur propre mérite

當言用及處    exprimé suivant leur fonction et leur place.

事存函蓋合    Les phénomènes existent et s'ajustent comme une boîte et son couvercle

理應箭鋒    les principes s'accordent comme la rencontre de deux pointes de flèches

承言須會宗    Entendant les mots comprenez-en le sens,

勿自立規矩    ne créez pas vos propres règles.

觸目不會道    Si vous ne comprenez pas la voie qui se trouve sous vos pieds,

運足焉知路    comment connaîtrez-vous le chemin sur lequel vous marchez ?

進歩非近遠    La pratique n’est pas une question de près ou de loin,

迷隔山河故   mais dans la confusion, des montagnes et des rivières font obstacle.

謹白參玄人    Vous qui cherchez la voie, je vous en prie,

光陰莫虚度    ne laissez pas passer les jours et les nuits en vain.

 

******

 

Shunryu Suzuki Roshi, La source brille dans la lumière

Commentaires du Sandôkai de Maître Sekito Kisen

 

 « Dans le bouddhisme, les quatre éléments sont le feu, le vent, l'eau et la terre. Bien que cela ne les décrive pas parfaitement, nous disons qu'ils ont chacun leur propre nature. La nature du feu est de purifier. Le vent amène les choses à maturité. Je ne sais pas pourquoi mais le vent à la propriété de favoriser la maturité. L'activité du vent est plus biologique et celle du feu plus chimique. La nature de l'eau est de contenir.

Où que vous alliez, il y a de l'eau. L'eau contient tout. C'est le contraire de la façon habituelle de penser : au lieu de dire qu'il y a de l'eau dans le tronc de l'arbre, nous disons que l'eau contient le tronc et aussi les feuilles et les branches.

Ainsi, l'eau est quelque chose de vaste au sein de quoi tout existe y compris nous-mêmes.

La solidité est le propre de la terre. Le mot terre, ici, ne veut pas dire terrain ; il désigne la nature solide de la matière. D'après le bouddhisme, on peut réduire les choses à la plus petite entité imaginable et celle-ci s'appelle gokumi. On l'identifie parfois à l'atome mais ce n'est pas vraiment exact car l'atome n'est pas l'ultime particule. Je ne connais pas la terminologie précise mais d'après ce que je comprends de la physique moderne, l'ultime particule d'être, la plus infime de toutes n'a ni poids ni taille. Elle n'est plus qu'énergie électrique. Curieusement, on trouve la même idée dans le bouddhisme. Bien qu'il possède les quatre éléments - feu, vent, eau et terre- gokumi n'est pas quelque chose de solide. Arrivé là, on s'aperçoit que sa nature n'est autre que la vacuité. Les quatre éléments ne sont pas uniquement matériels. Ils sont énergie, potentiel, disponibilité. C'est gokumi. A chacun des quatre éléments, nous attribuons la qualité de vacuité. Ainsi le feu, le vent, l'eau et la terre sont vide.

Bien qu'étant vide, à partir de cette vacuité même, les quatre éléments apparaissent.

Et dès qu'ils apparaissent, gokumi, l'infime particule est là aussi. C'est ainsi que les bouddhistes comprennent l'être. On pourrait croire qu'on est en train de parler de la matière mais les quatre éléments ne sont pas que de la matière. Ils sont à la fois esprit et matière. L'esprit qui pense en fait partie. En conséquence de quoi, la vacuité embrasse le matériel et le spirituel, l'esprit et l'objet, le monde subjectif et le monde objectif. La vacuité est l'état ultime de l'être, hors de portée de notre mental. Donc chacun des quatre éléments retrouve sa nature propre, c'est-à-dire qu'il va au vide « comme l'enfant se tourne vers sa mère ». Sans mère il n'y a pas d'enfant. Si l'enfant est là c'est que la mère est là. Si la vacuité est là c'est que les quatre éléments sont là. Et bien qu'ils soient là, ils ne sont rien d'autre qu'une forme momentanée de l'ultime vacuité ».

******

 

Translitération pour le chant

CHIKUDO DAISEN NO SHIN,
TÔZAI MITSU NI AIFU SU.

NINKON NI RIDON ARI,
DÔ NI NAMBOKU NO SO NASHI.

REIGEN MYÔ NI KÔ KETTARI;
SHIHA AN NI RUCHÛ SU.

JI O SHÛ SURU MO MOTO KORE MAYOI;
RI NI KANÔ MO MATA SATORI NI ARAZU.

MON MON ISSAI NO KYÔ,
EGO TO FU EGO TO.

ESHITE SARANI AI WATARU;
SHIKARAZAREBA KURAI NI YOTTE JÛ SU.

SHIKI MOTO SHITSU ZÔ O KOTONI SHI;
SHÔ MOTO RAKKU O KOTO NI SU.

AN WA JÔCHÛ NO KOTO NI KANAI;
MEI WA SEIDAKU NO KU O WAKATSU.

SHIDAI NO SHÔ ONOZUKARA FUKUSU,
KONO SONO HAHA O URU GA GOTOSHI.

HI WA NESSHI, KAZE WA DÔYÔ,
MIZU WA URUOI, CHI WA KENGO.

MANAKO WA IRO, MIMI WA ONJÔ,
HANA WA KA, SHITA WA KANSO.

SHIKAMO ICHI ICHI NO HÔ NI OITE,
NE NI YOTTE HABUNPU SU.

HONMATSU SUBEKARAKU SHÛ NI KISUBESHI,
SONPI SONO GO O MOCHIYU.

MEICHÛ NI ATATTE AN ARI,
ANSÔ O MOTTE Ô KOTO NAKARE.

ANCHÛ NI ATATTE MEI ARI,
MEISÔ O MOTTE MIRU KOTO NAKARE.

MEIAN ONO ONO AITAI SHITE
HISURU NI ZENGO NO AYUMI NO GOTOSHI.

BANMOTSU ONOZUKARA KÔ ARI,
MASANI YÔ TO SHO TO O IU BESHI.

JISON SUREBA KANGAI GASSHI;
RIÔZUREBA SENPÔ SASÔ.

KOTO O UKETE WA SUBEKARAKU SHÛ O E SUBESHI;
MIZUKARA KIKU O RISSURU KOTO NAKARE.

SOKUMOKU DÔ O E SEZUNBA,
ASHI O HAKOBU MO IZUKUNZO MICHI O SHIRAN.

AYUMI O SUSUMUREBA GONNON NI ARAZU,
MAYÔTE SENGA NO KO O HEDATSU.

TSUTSUSHINDE SAN GEN NO HITO NI MÔSU,
KÔIN MUNASHIKU WATARU KOTO NAKARE.

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